Libération, La Rochelle, «Un véritable guet-apens» [20/07/2024]

Les antibassines ont, lors de leur manifestation à La Rochelle, commis de nombreuses exactions, blessant plusieurs policiers, détruisant le mobilier urbain, dégradant des voitures … Bref, comme d’habitude.

Libération a, comme à son habitude lui-aussi, publié un article minimisant les dégats et diabolisant la police : « «Un véritable guet-apens» : à La Rochelle, la situation se tend entre opposants aux mégabassines et forces de l’ordre »

C’est ce que nous allons commenter.

Rq : le titre a été changé : il est devenu « A la mobilisation contre les mégabassines à La Rochelle, «on n’a pas peur de manifester pour un combat légitime» » Mieux non ?

La matinée

Le matin, les militants ont bloqué des silos vers 6h avant de se faire déloger, manu militari après avoir eu l’occasion de le faire pacifiquement.

On note dès le début, dans la présentation de Libération, qu’elle endosse les justifications des militants : « qu’ils comptent bloquer «symboliquement» pour dénoncer les pratiques de l’agro-industrie. » Le journal admet ainsi les justifications données par les militants ; accepte les éléments de langage (« blocage symbolique ») ainsi que l’existence des « pratiques de l’agro-industrie » que dénonceraient les militants.

L’exposé reprend encore le phrasé « victorieux » des militants, évoquant le « surgissement » des militants qui ont « déjoué le dispositif d’interdiction de manifester ».

Il insistent aussi sur le « calme » du blocage.

Puis, d’un coup, l’intervention des forces de l’ordre :

« Mais vers 11 heures, les forces de l’ordre les ont finalement délogés, à coups de gaz lacrymogènes. Du haut de son tracteur, Marie (1), une éleveuse laitière, regrette auprès de Libération la tournure des événements : «On était tranquillement installés et ils nous ont gazés, sans prendre le temps du dialogue.» Elle se touche la gorge, encore irritée par les gaz. »

Ce passage est ahurissant. C’est un mensonge pur et simple : les policiers ont justement discuté, comme l’a rapporté Géraldine Woessner qui était sur place. Libération se révèle encore une fois une courroie de transmission des militants. Il en rajoute encore plus pour victimiser la militante.

Mais le pire est à venir :

« Cette exploitante se sent «touchée et concernée par la cause» défendue par les activistes : la fin des megabassines, ces cratères d’eau qui pompent dans les nappes phréatiques pour qu’une poignée d’exploitants puissent arroser leurs cultures en temps de sécheresse. «C’est hyper flippant. Il y a beau y avoir des signaux [du réchauffement climatique] dans tous les sens, il n’y a pas de prise de conscience massive», déplore-t-elle. »

Ainsi Libération se fait non seulement la courroie de transmission des mensonges de l’écosystème, mais en plus de sa désinformation. En effet, sur le plan informationnel, cela n’apporte rien à la compréhension des événements. Cela permet juste de répéter les éléments de langage. On retrouve la même logique que dans Impact d’Olivier Norek : on profite de toutes les occasions pour répéter l’argumentaire.

Un terme m’interloque : l’évocation d’un « cratère ». En effet, c’est un terme peu adapté pour décrire un trou creusé par des pelleteuses et recouvertes de baches étanches. Néanmoins il est répété par l’écosystème pour évoquer la désolation et la destruction. Donc soit leur propagande a très bien marché, soit on n’a pas affaire à une « simple » éleveuse.

Au passage, on retrouve l’idée que les militants « sauraient » davantage : ils seraient, eux, éveillés.

Je passe sur la mention du dérèglement climatique, contre lequel les bassines participent en fait à lutter.

Le rassemblement

Ensuite, ils rejoignent le cortège principal, qui s’était formé à partir de 10h à La Rochelle. Les journalistes insistent sur le côté festif. Ainsi, le parc où patientait le cortège principal est décrit comme un « îlot de verdure situé face à l’océan Atlantique »« l’ambiance était encore joyeuse et festive : des parapluies en forme de méduses ondulent au-dessus des 4 000 manifestants » et évoque des « danses endiablées ».

Les événements sont évoqués, mais de manière neutre. RAS.

Puis, une des grandes figures de l’écoterrorisme : Andreas Malm est rencontré dans le parc. Libération lui donne la parole, il prétend que « La répression des forces de l’ordre, bien que pas étonnante, était très agressive » à propos de la veille et il déroule son discours :

« Il est essentiel d’accélérer le momentum autour de la lutte contre l’agro-industrie et les megabassines, réponse technologique qui n’est pas la solution pour lutter contre la crise écologique.» Il parle aussi convergence des luttes, avec cette défense de l’eau qui permet aussi de «renforcer» la dynamique du Nouveau Front populaire après les élections législatives. »

On retrouve la dénonciation du modèle agricole industriel et du « technosolutionnisme ». Enfin, on voit la logique économique du militantisme, qui est utile aux partis.

Le journaliste décrit ensuite le départ, évoquant une dame qui encourage le convoi en faisant un V et un activiste qui colle un post-it sur une voiture avec le message « On fait ça pour nos enfants. »

La première permet de présenter la manifestation comme soutenue par la population, même si l’anecdote est parfaitement insignifiante.

Le second est plus intéressant : il promeut un des éléments cruciaux de la pseudo-écologie : la prétention au désintérêt.

Les troubles

On arrive enfin aux troubles. Attention ça va vite :

« Un peu plus loin, les portes vitrées d’un Super U ont été brisées. Des activistes en sont sortis les bras chargés de bouteilles d’eau et de sandwichs. L’un d’eux, grand seigneur, a glissé une pizza 4 fromages entre les grilles d’un portail d’une maison. Vers 13 heures, de premières grenades lacrymogènes ont été lancées par les forces de l’ordre, provoquant un mouvement de panique dans le cortège, qui passait à ce moment-là dans l’étroite – et sans issue – avenue des Corsaires. »

Voilà, donc la destruction d’un abribus, de mobilier urbain et de bennes disparaissent magiquement et le pillage du Super U, qui a inclus la destruction des portes vitrées et les menaces de violence contre les gérants devient :

  • Une simple intrusion : les portes vitrées étaient déjà brisées et aucune violence à déplorer.
  • Les actes de « grands seigneurs » au bon coeur.

Surtout, le journaliste parle de bouteilles d’eau, alors que le rayon alcool a été pillé …

Ainsi, non seulement les nombreuses violences ayant émaillées se cortège disparaissent, mais en plus celle qui est mentionnée est euphémisée. C’est dans ce contexte présenté comme plutôt paisible qu’arrive, encore, la maréchaussée avec ses fumigènes. L’inversion victimaire continue ensuite :

« Plusieurs blessés de part et d’autre.

Pris dans cette souricière enfumée, des dizaines de manifestants se sont réfugiés dans la cour d’un immeuble, où des street-médics ont rapidement pris en charge des blessés : un homme allongé par terre saigne du crâne, une femme a le visage recouvert de sang. Quelques minutes plus tard, tout le monde s’est remis en marche, en sens inverse. «C’était un véritable guet apens : la foule était hyper compacte, il y avait de la lacrymo partout et on ne pouvait aller nulle part», dit une jeune femme de 24 ans. Un de ses amis abonde : «C’était irresponsable de nous nasser comme ca.»

Mais la situation reste tendue : faute d’alternative, pour éviter les grenades lacrymogènes et une charge de CRS, plusieurs centaines de militants s’engouffrent dans l’immense cour d’une résidence. Des habitants ouvrent (puis ferment) leur portail : une dizaine de manifestants s’y pressent afin d’échapper aux forces de l’ordre. »

Ce seraient donc bien, selon Libération, les forces de police les seules responsables. Ils ne parlent à aucun moment des violences des blacks blocks, elles sont euphémisées derrière la phrase lacunaire : « Plusieurs blessés de part et d’autre ».

Le deuxième cortège

Ensuite, l’attention passe au cortège pacifique.

Autre ambiance du côté du deuxième cortège qui longe la plage, mené par une «brigade de clowns» qui s’amusent à faire des blagues aux passants.

Le ton est plutot factuel. Puis, une petite bombe : « Vers 14 heures, le joyeux cortège s’arrête et se rue à l’eau. «Nous sommes tous des ecoterroristes», scandent-ils dans l’eau entre deux chants. » Normal, être écoterroriste, c’est tendance non ? Libération ne relève pas, commentant : « On aura rarement vu autant de fesses militantes… »

Du journalisme de propagande

Les journalistes, Eléonore Disdero et Amelie Quentel, nous ont donc livré un article d’une partialité totale. Les exactions sont tues, les casseurs invisibilisés, les policiers diabolisés. Elles se servent au passage de cet espace pour diffuser sans contradiction les discours pseudo-écologistes. Bref, il s’agit de propagande, ni plus ni moins.

Faudrait-il commencer à parler de Libération comme un journal de propagande ?