Commentaire de The Seeds of Vandana Shiva (2022)

On parle souvent de Vandana Shiva comme d’une rock star. Et bien deux réalisateurs militants, Camilla et James Becket ont fait un film biographique sur elle (qui semble distribué par sa propre entreprise, vandanashivamovie). C’est une source très intéressante, reprenant l’ensemble de son oeuvre et de son personal branding.

Vous pouvez voir le film avec un VPN ici : The Seeds of Vandana Shiva. Vous noterez que la description la présente comme « the worlds most powerful opponent of Monsanto » …

Introduction

La première scène se déroule à la campagne, Vandana Shiva se balade à la campagne, a un coup de téléphone, va en ville et prend l’avion jusqu’à être présentée (on note que certains lui donnent du « Dr Vandana Shiva »), puis on la voit au pupitre et ses premiers mots sont : « I believe, the war against the earth begins in the minds of men. And I mean men. Espacially men who control power and capital. » (2’10 ») Puis, visiblement dans une autre conférence, « Industrial farming is the single biggest destructive force on the planet today. Both in therms of what’s happening to the earth as well as in terms of what’s happening to society. » Puis « Food has been turned into a war. » On avance, elle est présentée comme une « rock star », avec de nombreuses personnes lui serrant la main en lui disant « You’re my hero ». On a même l’acteur qui joue The Hulk dans les films Marvel qui, le regard inspiré, lui fait un chaleureux baise main (3’16 »), suivi par des selfies avec d’autres personnalités, je suppose, que je ne reconnais pas.

La starification continue, elle est présentée comme accessible, parlant au petit fermier comme aux parlementaires, comme très énergique, etc.

« 40% of the solution to climate change lies in organic, ecological farming in the hands of small farmers. » (4’29) Après quoi, on a des images de paysans cultivant à la main. « Owning intellectual property rights on seeds is a pathetic attempt at seed dictatorship. Our commitment will make sure that dictatorship never flourishes ». Flash d’images de banques de semences. La séquence se finit sur un propos dramatique : « When you control food, you control society. And I would say for seeds, when you control seeds, you control life on earth. » (5’30)

Les prémisses

Après cette introduction dense, on arrive au vrai « début » du film biographique. Elle raconte que son père était conservateur de foret, « protecting the forest was his work. » Elle présente une vision idéale de ses balades en forêt avec son père. Elle raconte avoir été à l’école dans un couvent, qu’elle a été inspirée par Einstein. « Einstein was the shaper of the dream of my life. » (8’30 ») Ensuite elle va à l’université étudier la physique, puis va étudier (stage ?) au Bhabha Atomic Research Center, où elle aurait notamment assisté à la première mise en route de réacteur à neutrons rapides.

Puis intervient un personnage récurrent : sa soeur Mira, qui est « a medical doctor » (elle précise sans doute parce qu’elle abuse de ce titre …). Elle lui pose des questions basiques sur les effets des radiations sur la santé et l’écologie et, c’est la prise de conscience : elle ne sait pas ! Elle le présente sous un jour dramatique, avec au passage des images d’explosions atomiques, de gens brulés, puis sa soeur annonce son idéologie antinucléaire : « The Hiroshima – Nagasaki, what had that done to the people ? For me, nuclear was that. And radiation was that. » [On peut se demander si, du coup, elle a déjà prescrit une radiographie ou bénéficié des nombreux avantages des technologies nucléaires en médecine …] Vandana Shiva insiste sur le fait que ne pas être sensibilité aux conséquences était grave, concluant « I felt violated and I gave up my idea at that time of being a nuclear physicist. » (10’20 ») Elle aurait alors étudié par elle-même et « found quantum theory » [double sens volontaire ? Cela peut dire « rencontré » ou « découvert » …]. On a ensuite une débauche de bullshit : « Quantum theory opens our world to relate at the level of interrelationships. » (11′) Elle et une dizaine de personnes de différents profils s’intéressant au sujet se seraient rejoint à l’Université d’Ontario, mais, avant de faire son doctorat, elle voulait retourner en Inde. (12’30)

On observe qu’elle ne dit pas un seul instant qu’il s’agissait d’un doctorat de philosophie, laissant planer l’ambiguité. Rappelons qu’elle n’a au final jamais étudié la physique quantique académiquement.

Chipko (1973) (12’50 – 18’05)

Lors de ce retour, elle aurait découvert qu’une foret qu’elle connaissait avait été rasée pour faire des vergers. Elle présente ça comme un drame. Parle de la cueillette des femmes dans les forêts, que ce genre de choses seraient un problème de survie. Elles auraient eu gain de cause : « In was in 1981 that eventually the government listend to women and ordered a ban on logging in the high altitude Himalaya.« 

Ce passage consiste en substance à glorifier les femmes, elle répète à quel point ces militantes l’ont inspirées, monte en épingle leurs pratique (embrasser les arbres), comme quoi ça a inspiré d’autres militants à s’attacher à des arbres, etc. Elle aurait été bénévole pour Chipko pendant son doctorat.

Une phrase importante : « They taught me how much women who had never been to school knew in terms of the interconnectedness of nature. » (18′) D’abord, elle dessine une voie de restauration de l’égo: « Même si vous n’êtes pas socialement élevés, vous connaissez des choses importantes. » C’est un des points importants des pseudo-causes pour exploiter les personnes « défavorisées ». Mieux, dans le reste du discours, elle place ces choses au pinacle de la société. Le message deviendra alors qu’il y a donc une injustice : connaissant mieux ces choses cruciales, elles devraient avoir une place sociale plus haute.

Notez qu’on s’inscrit ici dans la mythologisation de la forêt, comme incarnation de la nature et l’exploitation forestière comme diabolique (même si le cas qu’elle allègue, l’exploitation sauvage des forêts de montagne entraînant des glissement de terrains, semble plausible et condamnable).

Water Wars (1982) (18’11 – 25’20)

Ce passage est beaucoup plus intéressant, montrant le degré de gloubi-boulga que la militante se permet.

Le gouvernement lui auriat demandé une étude sur l’impact des mines de calcaires [On sent ici une imposture assez terrible, Vandana Shiva n’ayant eu aucune formation permettant de réaliser une telle tâche.] de surface dans la vallée de Doon. Elle personnifie les montagnes : « There were scars all along the mountain. » (18’30 ») Le gouvernement était préoccupé par la laideur des mines, mais elle alla aux femmes, qui lui dire que le problème était l’eau. Ensuite elle aurait « tout lu sur les liens entre calcaire et l’eau« . La pluie tombant sur le calcaire créerait des cavités géantes, qui seraient « nature’s aquifers » (19’20). Elle conclut: les mineurs retireraient à la vallée ses sources d’eau, des « ressources en d’eau d’une valeur de milliards de dollars » ; les déchets des mines détruisaient le lit des cours d’eau, des villages étaient emportés, les travailleurs étaient exploités et, s’ils s’organisaient, les leaders étaient tués. Elle raconte aussi un coup de téléphone la menaçant de tuer son fils et mari, mais son père l’a convaincu de continuer en lui disant de suivre sa conscience. Elle prétend ensuite que l’extraction de calcaire aurait obligé à construire un barrage et qu’elle aurait pu convaincre la Cour Suprême (ce n’est pas clair).

Ce passage est délirant. Le gouvernement aurait été préoccupé par le tourisme, et donc aurait diligenté Vandana Shiva, qui ne connait quoi que ce soit ni en tourisme, ni en écologie et elle serait allé poser des questions « aux femmes », qui lui auraient répondu que « le problème est l’eau », puis elle prétend que le calcaire SERAIT UNE SOURCE D’EAU et parle d’aquifères qui seraient présents SUR LES PENTES D’UNE MONTAGNE. Cela n’a pas le début d’un sens. Le propos est d’ailleurs parfaitement décousu, c’est une accumulation d’éléments visant à diaboliser cette exploitation minière. Quant à son histoire de prétendu coup de téléphone, ce genre d’histoires de victimisation sont récurrentes dans la pseudo-écologie et, si cela est une réalité dans certains pays, je doute très fortement quand cela vient d’un leader pseudo-écologiste dont le métier est littéralement de mentir.

Ce qu’elle va dire ensuite est important :

If I am free to dedicate my life in service rather than constantly have to listen to what the money that finances my research wants me to do. I can serve much better if I’m free and independant.

C’est un élément récurrent dans la pseudo-écologie : la présentation de la recherche comme assujetti aux pouvoirs de l’argent. Néanmons, en pratique il y a un double standard : cela ne concerne que lorsque le financement est privé. Lorsque le financement est public ET qu’il n’y a aucun lien plus ou moins vague entre l’auteur et l’industrie, alors elle est montée au pinacle. Cela permet d’assujétir, en fait, la recherche et de ne garder que ce qui les arrange. Par ailleurs, le discours n’est pas logique, vu qu’elle prétend avoir été diligentée par le gouvernement.

Elle dit ensuite qu’elle a créé la « Research Foundation for science technology and ecology », qui est présenté comme le projet originel dans l’ancien abri des vaches de son jardin, avec le soutien de ses parents. Son frère présente cela omme le projet initial de Vandana Shiva, où « Where all the research work is done, all papers, technical papers, etc. are published ».

On continue dans le rejet de « la science » : « I think, one of the most important learnings I had when i was reasearching for writing, is how what we call science is a very narrow patriarchal project for a very short period of history. » (23′) On voit l’empreinte ici de la French Theory …

Elle développe : « Domination of nature, exploitation of nature, declaring nature as dead. Who are the experts in forest ? Those who know how to cut the trees. Similarly, who were the experts in geology ? Cement industry, sugar industries, steel industry .. that was their expertise. » Ici c’est simplement faux : il y a de nombreux experts des forêts et de la géologie qui ne se rattachent pas à ces industries. Par ailleurs, je ne vois pas ce que les industries du sucre (what the fuck ?), de l’acier (ils ne font que transformer le minerai) ont à voir avec la géologie. Elle conclut : « And that’s why I started the research foundation, I called it the Institute for Counter Expertise. To counter the expertise of the destroyers and bring to the front the knowledge of those who are defending the earth and their lives. » (24’10)

Elle présente son modèle de science participative, qui consiste à mettre en avant les populations impliquées. On retrouve le dénigrement de la science: « So either you’re gonna have a billion dollar grant and hire hundreds of research scholars who don’t know anything about the situation. Or, you can have a few thousands dollars and work with the communities who are being affected. And they do all the research. And maybe they will write in Hindi and all you have to do is translate into english. » (24’40 ») On est typiquement dans le registre de la pseudo-alternative, pour dénigrer la science. Après tout, pourquoi étudier si n’importe qui de concerné par un problème sait tout ce qu’il y a à savoir sur ce dernier ?

Elle conclut sur l’assujetissement à l’argent: « When money is your master, then your conscience is no more your guide. » (25’15)

Custody (1985) (25’24 – 28’27)

Je ne détaille pas, elle parle ici de son mariage, du fait que la législation indienne favorise le père dans l’attribution de la garde de l’enfant et accuse son mari d’avoir été absent, fou et alcoolique. Elle met ça sur le dos des britanniques. Elle aurait mené l’affaire devant la Cour Suprême et ça aurait été le premier cas où la Cour a décidé qu’une mère ait la garde. [à confirmer]

Eco-féminism (1985) (28’28 – 33′)

Elle évoque avoir été invitée à la United Nations decade for women conference à Nairobi en 1985 pour son implication avec les Chipko et qu’on lui ait conseillé d’écrire un livre liant écologie et féminisme. Elle prétend qu’elle a dit non parce qu’elle avait toujours détesté écrire. Cela semble inventé, vu qu’à cette époque elle avait déjà dû beaucoup écrire, notamment pour son doctorat de philosophie. Ce détail est intéressant à souligner pour montrer cette myriade de petits mensonges qui viennent construire son histoire. (29’30 »)

Questionnée sur la taille de son bindi (le rond au milieu du front) elle répond qu’elle ne le portait pas quand elle était jeune, mais qu’elle l’a mis pour [bullshit métaphysique]. Évoque encore « l’interconnectedness of the universe« . Cela répond à des critiques sur son bindi. Je me souviens d’un chercheur indien qui disait « The greater the bindi, the greater the lies ».

Violence of the green revolution (1984) (33’01 – 38’20)

En 1984, il y aurait eu une explosition de violence extrêmiste au Punjab entre Sikh et Hindus. Elle travaillait pour « the United Nation University » sur les conflits autour de ressources. Elle a fait un lien avec les nombreux conflits sur l’eau qu’elle avait notés. (34′) En décembre, il y eut le désastre de Bhopal : la fuite d’une usine de pesticides. Elle réalisa que Punjab était la terre de la révolution verte. (35′) Elle dit « Green revolution got a Nobel peace Prize. » (35’30 ») Il s’agissait de Norman Borlaug, pas de « la révolution verte » … Elle semble accuser la révolution verte d’être responsable du conflit au Punjab, sans qu’on sache pourquoi : « The big spin about the green revolution was with chemicals there would be more food. With more food, there would be more prosperity. And with more prosperity, there would be more peace. And yet, here we are with all of this death. » (35’54) En montrant des images de violences au Punjab. Elle commente, répétant un de ses leitmotiv : « You’re supposed to give a peace Nobel Prize for peace … this is war. »

On entre ensuite dans la désinformation agricole classique (« les sols sont morts, etc.), explicitant son accusation liant les violences au Punjab à la Révolution Verte : « And I found that after the Green Revolution, the soils were dying, the rivers were dying, there was desertification. 25% of small farmers were dispossessed. So in Punjab, men who were angry were taking to guns and throwing bombs. this was about an agrarian crisis. Punjab was never about conflicts between Hindus and Sikhs. I found that the people being killed were the managers of the seed banks, managers of the Bhakra Dam, people building the canal to take water from the Sutlej River to Haryana. These were all key position of bureaucratic power controlling the architecture that allowed the Green Revolution to happen. » (36’36)

On voit là toute la maigreur de son raisonnement, qui n’en est pas réellement un : elle se contente d’affirmer péremptoirement une responsabilité et, pire, une responsabilité total, prétendant que cela n’aurait jamais été un conflit ethnique. Or, en France et un peu partout dans le monde, la mécanisation a entraîné la consolidation des exploitations et la chute du nombre de petits fermiers. Cela a pu être difficile à vivre pour certains, mais au final, il suffit de faire un autre travail. D’ailleurs, s’il y a eu des heurts, ça a surtout été en raison de la difficile gestion des prix agricoles. Quand à son allégation sur les morts, elle n’apporte aucune source et ne mérite donc pas d’être étudiée.

Sa conclusion est hautement complotiste : « So at the end of it, I did the book for the United Nations University. To show that so many conflicts, which are made to look like they’re ethnic or religious, have at their roots conflicts over natural resources. »

Intervient ensuite André Leu, « International Director » de « Regeneration International », qui prétend qu’elle avait raison et qu’on commencerait à voir la fin de la révolution verte en raison des dommages faits aux communautés de fermiers. Tout est évidemment faux, la révolution verte a avant tout été l’adoption des moyens de production agricole modernes, si elle se finit, c’est que ces moyens de productions ont été adoptés (et il me semble qu’il y a encore un peu de travail pour ça).

Vandana Shiva conclue : « Having understood that green revolution was a lie, I had to start working on sustainable agriculture. » (38′)

Patents on life (1987) (38’23 – 44’47)

On arrive enfin à la ‘fameuse’ réunion de 1987. A cause de son livre sur la révolution verte, elle aurait été invité à plus de conférences portant sur l’agriculture, dont celle qui nous intéresse (38’30 – 40’31 ») : « And one of these conferences was on the Laws of Life, the emerging bio technologies » à Genève. Elle aurait été invité avec sa soeur Mira. « So we trot off to Geneva and we sit through this discussion where the industry lays out its great vision for the future : we have to do GMOs because that allows us to patent seeds, and it’s not enough that it’s in Europe, we’ve got to get the world. We need an international treaty. [images de Monsanto] »

Tout d’abord, cela pose la question de cette fameuse réunion. Ici elle laisse entendre qu’elle se tiendrait à Genève, mais dans l’autres propos, elle l’att

Plus largement, si on cherche « conference on the laws of life 1987 », on ne trouve rien. En cherchant « conference on biotechnology 1987 », on trouve plus de choses : « 4th European Congress on Biotechnology, 1987, Amsterdam » et « World Conference on Biotechnology for the Fats and Oils Industry 1987″ à Hamburg. » Rien à Genève ou dans les environs.

Maintenant son allégation est intéressante, car elle est totalement désarticulée : « Nous devons faire des OGM car cela nous permet de breveter des semences » et .. et quoi ? « Et nous voulons étendre ce plan démoniaque au monde » ? Même si ce qu’elle rapportait était correct, cela ne signifierait rien de profond : il n’est pas aberrant que des gens d’un secteur parlent de ce qu’ils pensent être une bonne opportunité d’affaires, avoir des semences brevetées, et qu’ils estiment qu’un traité international serait utile, par exemple pour garantir le respect de la propriété intellectuelle. Néanmoins, ce serait étonnant, vu qu’un marché des semences où la propriété intellectuelle est protégée existe déjà pour les semences « classiques ». C’est un point que Vandana Shiva tente de faire oublier, mais toute notre nourriture a été « génétiquement modifiée » : regardez si une théosinthe ressemble au maïs moderne ! Idem pour la banane, la pastèque, etc. L’agriculture elle-même se définit par la manipulation génétique : la « domestication ». L’amélioration des techniques de croisement a d’ailleurs été l’un des principaux moteurs de la première révolution agricole industrielle.

Néanmoins, elle utilise des procédés rhétoriques pour insinuer que ce plan serait en fait une conspiration sournoise pour prendre le pouvoir. Elle le précise ensuite.

And I realized, GMOs weren’t GMOs for feeding the world. The spin later would be about feeding the world. But the reality was that they were the door to owning life on Earth. Now when industry enters the picture on seed, industry needs monocultures, because they want to sell the same seed everywhere, the have to stop being ecological because they have to replace people with herbicides. They have to replace people with machines. They have to become industrial. They have to get rid of the small farmer. But industrial farming is the most insane human activity. [Image d’élevage immense] It’s taking 70% on the grain ! That could be feeding people. So during this meeting, i got scared. » (39’30-40’30)

La diabolisation s’explicite rapidement : « la porte pour posséder la vie sur Terre », rien que ça ! On ne sait pas pourquoi ni comment.

Ensuite on apprend qu’ils favoriseraient la monoculture parce qu’ils voudraient la même semence partout. C’est absurde à plusieurs niveaux:

  • La monoculture ne se définit pas par rapport à la variété, mais à l’espèce (blé, maïs, etc.). On peut parfaitement planter des variétés différentes de la même espèce d’une année sur l’autre en monoculture, par exemple en choisissant une qui soit résistante à une maladie dont le risque est plus élevé telle année.
  • Pourquoi l’industrie semencière voudrait vendre « la même semence » partout ? Si on imagine le même monopole absolu que la militante, il suffirait de vendre n’importe quelle semence, OGM ou non, cette hypothèse n’a simplement pas de sens. Elles doivent donc vendre un produit compétitif. Or, l’efficacité des variétés dépend de leur contexte. Par exemple, il y a de nombreuses maladies, qui varient du tout au tout selon le lieu, et toutes les variétés ne sont pas également résistantes.
  • Elle est expressément en train de promouvoir le désherbage à la main et donc l’agriculture de subsistance difficile et pénible des pays pauvres. Et on voit mal comment l’industrie semencière pourrait avoir un impact sur les méthodes de désherbage des agriculteurs et, surtout, ce qu’elle pourrait en avoir à faire.
  • Elle présente « They have to get rid of the small farmer.  » comme une conclusion de ce qu’elle vient de dire. Cela n’a aucun sens, on voit ici jouer à plein l’effet d’apposition. Elle mélange ensemble plusieurs éléments vagues et en réalité absurde pour générer une conclusion encore plus absurde juste par leur accumulation. Qui serait « they » ? Pourquoi auraient-ils « besoin » de se débarasser du petit agriculteur ? Les agricultures moins efficientes ont toujours été évincées par les productions plus efficaces. Cela vaut aussi pour l’artisanat du reste, c’est le fonctionnement le plus organique de l’économie. Ici il s’agit de diaboliser « Eux » (l’industrie semencière ? on ne sait pas précisément) et de victimiser « les petits fermiers ».
  • Enfin, toujours dans l’absurdité la plus totale, elle reproche l’élevage intensif à l’agriculture industrielle. Or, l’agriculture industrielle est moins dépendante de l’élevage que l’agriculture traditionnelle, qui en avait besoin non seulement pour la fertilisation, mais en plus pour le travail du sol. Le fait qu’une large partie (pas 70% …) du grain nourrisse les animaux n’est pas du tout une caractéristique de l’agriculture industrielle, mais la conséquence d’un contexte économique.

Ensuite elle parle de Gandhi, qui est un de ses thèmes d’appropriation historique favoris. Ce dernier aurait utilisé le rouet en disant « si nous faisons nos propres vêtements, nous seront libre », parce qu’il serait suffisamment petit pour être dans les mains de toutes les femmes et chaque femme deviendrait un « combattant de la liberté » contre le monopole britannique sur les textiles. Elle fait un parallèle : « First revolution was textile. Gandhi pulled out the spinning wheel. The second revolution was chemical. An Rachel Carson wrote « Silent Spring ». An we got the environmental movement. » (40’49-42’10) On voit ici qu’elle n’est pas capable d’aller jusqu’au bout de son appropriation historique. Quel rapport entre le rouet et le livre de Rachel Carson ? Et c’est quoi cette histoire de « première révolution » et « seconde révolution » ? Ce passage illustre encore le fait que son discours n’est un gloubi boulga informe, dont le contenu exact n’a aucune importante : c’est son impact, son aspect performatif qui est important. Ici, il s’agit juste de s’approprier l’image de Gandhi et, ensuite, de faire le parallèle en présentant la révolution verte comme de la colonisation.

Selon elle, « l’industrie de la vie avec la biotechnologie » serait la « troisième révolution industrielle » (42’15). On voit clairement exprimée ici ce que j’appelle la « posture du sachant »: cette prétention à dire des choses qui appartiendraient au savoir institutionnel, reconnu, même en débitant les pires âneries. Elle explique ensuite qu’en descendant de l’avion « the seed was speaking to me » (42’28). Cette personnification, s’inscrit dans la dimension ésotérique de la pseudo-écologie, notamment sa mythologisation de la nature, qui aurait des sortes d’avatar (ici, « la semence »).

« Saying the seed is the spinning wheel of today. Farmers with their own seed fighting for their seed freedom are the biggest force in the world against seed monopoly. » (42’35-42’50) Elle continue son idée insensée d’un « monopole des semences ». Les « petits fermiers » apparaissent de plus en plus comme une figure de sa mythologie : victimes, modèle agricole, là ils seraient « la plus grande force » pour lutter contre « le mal ». Elle continue en prétendant qu’en Inde, il y avait tellement de semences que personne n’était soucieux et que 80% des semences « venaient des fermiers eux-mêmes » et 20% du gouvernement « for food security » (ce n’est pas ce que j’appelle de l’abondance …). Elle affirme « we had no breeding of seed for profit. » (43’10) Cela me semble hautement douteux, à moins que l’agriculture indienne soit restée au XVIIIe siècle ou même avant. Quoi qu’il en soit, cet ensemble prétend illustrer la raisonnable insouciance des indiens face à l’arrivée du « monopole des semences » par les biotechnologies. [encore une fois, confusion entre innovation variétale et OGM]. Néanmoins, elle, ayant été à la conférence de 1987, « knew what was coming » (43’20) , « and I said If we wait until this disaster strikes, there will be nothing left to save. » Son propos est aberrant pour plusieurs raisons : les OGM n’ont pas vocation à s’appliquer partout tout le temps et c’est surtout le marché qui aboutit à la réduction de la variété des plantes cultivées.

Le passage suivant est extrêmement confus. Elle raconte qu’elle serait allé dans des villages de l’Himalaya pour collecter leurs semences. Néanmoins, on la voit vanter une semence devant un groupe de villageois « Wheat seed, which is very drought-resistant, very high length of storage and extremely tasty. » C’est un peu surprenant, car le blé est une espèce, pas une variété. Certaines tolèrent mieux la sécheresse que d’autres et je doute que ce soit la plante qui tolère le mieux la sécheresse. Elle commente « But the men would always say « No, no, no, we grew potatoes. No, we do soybean, because that’s the crop they took to the market. » Elle essaierait donc bien de les pousser à cultiver d’autres choses (quitte à ce que ce soit contre leur intérêt).

Puis « And the woman of the house would say, I have the mandua, and I have the gongura, and I have the konni. Here. » (43-20 – 44’20) On retrouve donc la logique initiale. Mon interprétation est qu’ella a tenté d’imaginer une fable où les hommes auraient le mauvais rôle et les femmes le bon rôle et qu’elle s’est juste pris les pieds dans le tapis avec son mensonge. Elle conclut « So I start seed saving, going from farmer to farmer, field to field, encouraging them to save their own seeds, to conserve and distribute their seeds and to shift to organic farming. » On retrouve là la volonté de pousser les fermiers à adopter sa façon de faire. Notez comment c’est sournoisement placé, comme si de rien n’était, comme si c’était la suite logique du reste de ce qu’elle disait.

L’ensemble est d’autant plus aberrant qu’il existe des milliers de banques de semences dans le monde.

Navdanya (1994) (44’49 – 50’26)

Cela l’amène à Navdanya, son entreprise créée en 1991 (pourquoi elle marque 1994 ?). Elle fait un long salespitch. Elle la présente comme une ferme de formation et de recherche et une banque de semence [rq : je me demande si les condition de stockage sont correcte, elle semble être très rudimentaire]. (45′) Elle veut prouver que « biodiversity and native seeds can feed the world. » (45’10) Puis elle présente une étrange vision de la conversion du génome : « For me seed saving was never about a museum. I wanted it to be the seed of the future, where every seed we save is planted out every year. » C’est absurde, je ne vois pas ce qu’on peut dire de plus. Cela permet juste de rajouter du discours et de caller le mot « futur », donner un peu plus de vernis inspirant.

Elle continue en disant qu’il faut sélectionner les semences selon leur résistance aux conditions (sécheresse / innondations) et que le fermier est aussi le scientifique qui mesure la taille du grain, de la paille. Sa perspective aurait peut-être été relativement nouvelle au XVIIe ou au XVIIIe siècle. Aujourd’hui, c’est un métier, qui a ses méthodes, ses outils et son industrie : l’industrie semencière. On est typiquement dans le registre de la pseudo-alternative.

Après on a, comme toujours, la petite anecdote du challenger avec son directeur qui prétend que le terrain qu’ils ont acheté, ayant été cultivée en monoculture de sucre de canne, était vu comme abîmé, mais qu’ils ont malgré tout réussi à faire pousser 260 types de riz. Elle commente : « We used to have 200 000 rice varieties in this country. And the Green Revolution tried to breed one variety at a time. And each of them kept failing. Because the Green Revolution wasn’t successful in wiping it all out, we have been able to work with farmers to be able to bring this issue back. » (46’32 – 46’51) On retrouve la personnification de la Révolution Verte et l’attribution d’une volonté de destruction, contribuant un peu plus à édifier une mythologie.

Le second pan de son activité serait de créer des prises de conscience en organisant des manifestations. Elle raconte avoir présenté ce qu’elle pense sur les semences et les droits de propriété intellectuelle et d’avoir convaincu M. Singh Tikaet, un leader syndical agricole, qui aurait dit « I’ve understood, the East India Company is returning. We’ve got to fight for our freedom again. » Elle commente : « They understood immediately because the best teacher is the experience of past slavery, which allows you to know what new slavery could look like. But if that experience is so far out of your memory, then you fall for all the verbiage around invention, and IPRs and new technology. But if you have been enslaved before and you resources have been taken and your culture has been controlled, then when the new colonization comes, you know what’s coming. » (47’45 – 48’45) Évidemment, on peut douter de l’exactitude de son allégation, surtout la référence à la East India Compagny. Quoi qu’il en soit, ici on voit la convergence avec les discours décoloniaux, qui permet de se victimiser un peu plus en s’appropriant l’Histoire.

Le soutien du syndicaliste aurait amené des centaines de milliers de personnes à ses manifestations en 1992, 1993 et 1994. Elle prétend qu’à une de ces manifestations, le ministre de l’environnement brésilien d’alors lui aurait dit « Vandana, the reason they want to get rid of the small farmer is that the small farmer is the last free person on this planet. Everyone else has to depend on something else to make a living. But a small farmer with a piece of land, some seed in their hands, their intelligence, the sun shining, a bit of water, can produce with no external dependence. » (49’30-50’04) Ce propos est un point central de l’imaginaire autour du petit paysan comme « vie alternative« , notamment aux métiers de bureaux. N’ayant pas de chef, on serait libre. Évidemment, elle ne dit rien des contraintes et de la difficulté de ce mode de vie et, qu’au final, on n’est pas libre : quid des hopitaux ? quid des outils ? Ce « petit peu d’eau » d’où vient-il ? Pire, elle laisse entendre qu’il n’y a pas besoin de fertilisant. Bref, on retrouve encore le registre de la pseudo-alternative. On retrouve en outre le « ILS » complotiste.

Elle conclue : « That is why the independance of the small farmer is seen as such a threat by those who could like to control the last living system. » (50’05 – 50’17) C’est encore une sorte de gloubi boulga incompréhensible : qui sont « ILS » ? Quel « dernier système vivant » ? Le seul contenu ici est le sentiment généré d’avoir un diable tente de détruire quelque chose, mais que son projet est bloqué par un petit groupe gens du commun.

Battle in Seattle (1999) (50’27 – 54’57)

Une réunion de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) devait se tenir à Seattle en 1999, mais il y eu de grosses manifestations organisées par de nombreuses organisations , qui ont été assez brutalement réprimée. La réunion fut au final avortée. Il y quelques éléments que je relève. D’abord, la diatribe complotiste de Ronnie Cummins, de l’Organic Consumers Association :

« The idea was : how do we stop Monsanto ? How do we deal with the fact that they want to build this new world order based on the rights of multinational corporations and drive a billion farmers off the land. » (51’01 – 51’15)

Ensuite, ils se revendiquent de la « désobéissance civile » de Gandhi et présentent comme terrible la réponse des autorités. Ils allèguent avoir stoppé la réunion. Ronnie Cummins conclut : « It showed us that we have the power to stand up to the multinational corporations. » En réalité, cela n’a rien prouvé à part un pouvoir de nuisance ponctuel et sans conséquence réelle. Néanmoins, c’est important de dire ce genre de chose pour motiver la base militante, leur faire penser qu’ils sont dans le camp des vainqueurs.

Ensuite, on ne comprend pas trop pourquoi, on est à une conférence, présentée comme le « International Forum on globalization » où 6 personnes sont assises. On a des prises de paroles découpées et sorties de leur contexte. On ne sait pas si ces paroles se répondent directement ou non.

V.S. : We want a return on national decision making which we control.

Scott Miller (Proctor & Gamble) : The WTO system is voluntary. You choose to take on these obligations.

V.S. : We have watched our countries being forced to accept the rules by arm twisting, by constant threats.

David Aaron (Undersecretary of commerce for international trade) : It’s wrong to believe that the world trade rules are just for the big players, for the global corporations.

V.S. : The rules of intellectual property rights were written to protect the Monsantos. These are not rules for the environment and people. These are rules for monopolies.

Scott Miller : Income disparity is increasing, but I think not because of trade. I think because of skills.

V.S. : I assume he’s thinking that Monsanto has the right to take over control over seeds because it has high skills and the rest of the farmers having low skills can disappear from the planet. (53’33 – 54’24)

Cette séquence se termine avec l’audience applaudissant à tout rompre Vandana Shiva, y compris les autres personnes à la table, ce que je ne comprends pas. Bref, on voit bien le côté « divertissement », « spectacle » de ce genre de chose et l’habileté rhétorique de Vandana Shiva. Le passage est trop brouillon pour être commenté (on ne sait pas vraiment comment a été fait le montage et où), on a juste une démonstration de mauvaise fois et de manipulation rhétorique.

La seule chose intéressante est le second propos de Scott Miller, très global et flou, parlant de « skills« . A priori, ce qu’on voit là est un des élément important pour comprendre l’anticapitalisme (et la pseudo-écologie donc) : la médiocrité du monde des affaires, incapable de sortir d’un espèce de jargon vaseux plein de généralités qui a sans doute plein d’atout dans la communication interne aux affaires, mais se désagrège dès qu’il met un pied dehors. Je devine la présence, dans le monde de l’entreprise, d’un ensemble de mensonge comparable à celui qu’il y a derrière la pseudo-écologie (ce sont les forces qu’elle exploite en fait).

Ronnie Cummins conclut : « I think that for a lot of young people, young activists, that was the first time they had ever heard her. But she then becam, if not the acknowledged, the unacknowledged leader of the global food movement. » (54’39 – 54’57) Ce genre de compliments est un des ciments de ce genre d’écosystèmes, où l’image est la principale valeur.

Seed Monopoly (2002) (54’58 – 1h05’32 )

Dans ce passage, on commence avec la désinformation classique: les commerciaux pousseraient les fermiers à acheter des semences OGM (coton BT), avec des promesses de rentabilité, des spots commerciaux, etc. Néanmoins le coton BT (qui ne serait pas « analyzed for safety for agriculture and food » (56’48)) ne protègerait pas des nuisibles, mais entraînerait l’apparition de super-ravageurs, qui obligeraient les agriculteurs à utiliser encore plus de pesticides. (57′) Elle prétend que le prix des semences a augmenté de 8000% (57’20) et que les dépenses de pesticide auraient été multipliées par 13. Les fermiers auraient donc été endettés et poussés au suicide. Les réalisateurs ont le « bon gout » (pas du tout, c’est vraiment une pratique de charognard) de reprendre les images des funérailles, on suppose, d’un agriculteur s’étant suicidé. La preuve du changement est apportée par le témoignage d’un chef de village disant qu’il y en aurait eu 18 dans son village et d’un vieil indient disant que cela ne se produisait pas de son temps (58’56). Ensuite on a un plan sur une manifestation où Vandana Shiva et son amie je suppose (l’éditrice du début de la vidéo ?) crient « Farmer killer go back ». (59’50)

Le passage suivant est ahurissant: « Why are farmers still using it ? It was a question I had to answer for myself, and that’s when I realized that the alternatives had been destroyed. We happen to be sitting in the middle of all the seed industry shops right here. Monsanto is that side, Syngenta is that side. The next lane is all selling seeds of suicide. There is a system that’s used both by governments as well as by the companies and they call it seed replacement. They make it look like a scientific act. Yeah, and they sey « Your seeds are primitive and we must replace your seed with higher quality seed. So give that up and take this. And if they’re still reluctant to give up, you say ‘You know, I’d even give you 500 rupees for it. And the farmer again thinks, ‘Oh, I get 500 rupees. And I go pick up for my neighbor. Somewhere my seed will be available. My uncle, my aunt, my relative in a distant village will have it. But they don’t realize everyone’s doing the same thing at the same time. So within one season, there’s a blitzkrieg on seed replacement. » (59’55 – 1h01′)

Cela n’a juste pas de sens. C’est d’abord difficile à concevoir sur le plan pratique : s’ils ont des semences d’une année sur l’autre, ils ne vont pas les jeter. Si Monsanto leur vend des semences, ils vont les mettre de côté pour l’année suivante. Par ailleurs, il semble absurde de remplacer d’un coup l’ensemble de ses semences, ils vont tester sur une partie de la surface dans un premier temps logiquement.

Ensuite ce qu’elle présente comme une plan sournois et ingénieux, c’est juste un vendeur avec une promotion … Si ça suffisait pour conquérir l’ensemble du marché des semences d’une région agricole, où rappelons encore que les gens jouent leur vie ne choisissant leur semence, ça se saurait … Et rappelons enfin que le marché des semences est mondial : s’ils veulent du coton non BT, ils peuvent en avoir. Notez que cela présente les agriculteurs indiens comme des benets facilement manipulable. C’est un des aspects des pseudo-causes : elles rabaissent ceux qu’elles défendent.

Ce passage est en fait une stratégie de gestion des objections : en mentionnant une objection très légitime, qui met en lumière l’absurdité de son discours, elle donne l’impression qu’elle y répond. Même si, comme nous venons de le voir, elle n’y répond pas.

Cela lui permet de revenir sur Navdanya : « When I first created Navdanya, my dream and vision was we should be able to create a culture where seed can be free and farmers’ righs are defended. » (1h01’35) Rien à voir avec « créer un véhicule pour désinformer efficacement et capturer des financements » bien sûr … « We started to fights GMOs and corporate concentration through growing seeds and saving seeds. » (1h01’45) Il est insinué ici que les entreprises auraient réellement comme plan d’éradiquer la diversité des semences. C’est une diabolisation parfaitement claire.

Elle se vante ensuite d’avoir créé 127 banques de semences avec tout un réseau d’agriculteurs et « seed savers ». Elle leur ferait de la formation pour des cultures organiques de non-OGM de coton et de nourritures. « Now people have started to spread seed banks and seed libraries all over the world. »

Elle se présente implicitement comme à l’origine de ce mouvement de création de banques de semences et que son initiative a une place significative. Or, elle ne le démontre pas. En outre, il semblerait qu’il y ait de nombreuses banques par des oganisations prestigieuses : « des banques publiques (exemple : CGIAR dont les « Banques de Germplasm » subventionnées par la Banque mondiale, la FAO…), associant le CIMMYT au Mexique pour le maïs et le blé, l’IRRI aux Philippines pour le riz, l’ICARDA en Syrie… des banques dédiées d’organismes particuliers (ONF en France) ou universitaires (ex : celle d’Akira Miyawaki au Japon) qui ne conservent que des semences d’arbres pour la sylviculture ou l’agroforesterie ou la restauration de forêts diversifiées. » (Wikipedia) Est-ce que Vandana Shiva revendique les avoir inspirés ? Ou bien la réserve de Svalbard fondée en 2006, mais dont l’endroit stockait des semences depuis 1984 ?

Ensuite, sans qu’on voie le rapport « And at last, before I breath my last, I will see the end of BT coton in India. » [notez la dimension caricaturalement théatrale de son expression] (1h02’37) Elle raconte ensuite être allé en Afrique, se montre répétant sa désinformation dans différents endroits. Par exemple sur l’ingénierie génétique : « Genetic engeneering introduces a toxic gene. So you take the cells of an existing plant with existing yield, then you shoot a gene with a gene gun. You don’t know if that gene will enter so you add an antibiotic resistance marker. You don’t know if it will express so you add a viral promoter. » Ou encore en diabolisant les producteurs (« They calculated trillions and trillions of dollars of profits, thinking that they can make every farmer dependent on their seed and every country dependent on genetic engineering. »// « That is what the Plant Breeders Bill of Ghana is about. To make it a criminal act if farmers save their own seeds. The Plant Breeders act should be called the Monsanto takeover act. » // « It’s a very scary future, what’s really planned for Africa. if you add it all together, there’s a plan to displace all the African farmers, so that investors can run the kind of farms that exist in the United States and export the commodities. ») (1h04’30 – 1h05’35)

Les critiques (1h06’42 – 1h12′)

On arrive ENFIN vers la fin du film et elle aborde très logiquement les critiques dont elle fait l’objet.

Amorce

Cette partie commence sans être annoncée : Vandana Shiva fait une conférence de presse dans une minuscule salle avec une énorme table au milieu, présentant une étude « This is our study of health per acre. Industry measures yield per acre to measure commodities which don’t go to feed people. We measure health per acre to measure the nutrition that goes back to feed people. » (1h06’42) C’est encore le registre de la pseudo-alternative.

Elle diabolise au passage l’agronomie, qui est celle qui raisonne en termes de rendements, l’assimilant à « l’industrie » et la présente comme ne nourrissant pas. Elle nie au passage les productions non alimentaires, comme le coton. Elle a le discours réducteur classique, « Food sovereignty can feed two Africas. » (ce qui est probablement faux du reste)

Ensuite, une femme de l’audience essaye de questionner V. Shiva sur « Plant Breeders Bill and GMOs ». Vandana Shiva conteste : « This is a press conference. – Yeah it is. I was not invited ! I came because I wanted … – You gate crashed ! You gate crashed ! And you’re talking so much. – Okay, let me leave. – But you know, since I don’t know you … Madam, since I don’t know you, could you let me know who support your research ? Who finance your research ? – Let me just leave, because, if you don’t want my comments …  » Entretemps un message s’affiche : « Dr Attipoe is conducting GMA [typo ?] BT cotton field trials in Ghana. this research is funded by Monsanto. » (1h07’08 – 1h08’31) On note la diabolisation des financements de recherche privés, comme si chaque prestataire qui contractait avec Monsanto était irrémédiablement et absolument teinté du sceau de l’infamie. Réciproquement, le fait que Vandana Shiva tire ses revenus de la sphère pseudo-écologiste n’est pas vu problématique. C’est le double standard le plus important de la pseudo-écologie, un élément fondateur. Bref.

Puis, on arrive sur un écran avec des critiques de Vandana Shiva. (1h08’48)

Définir le cadre complotiste

Le message est clair : la militante serait harcelée par les suppots de Monsanto. Le fait que cette séquence navrante, qui ne révèle rien de particulièrement dérangeant, soit mise et utilisée à cette fin montre clairement la malhonnêteté des réalisateurs.

Ils sont allés retrouver cette séquence, l’ont sélectionnée pour lui donner un sens qu’elle n’a pas. C’est volontaire, c’est calculé.

C’est une séquence navrante, dans laquelle une femme qui ne sait visiblement pas ce qu’elle fait vient sur le terrain de la militante et semble oublier ce qu’elle voulait dire, si elle ne l’a jamais su. Si elle avait été plus compétente, elle se serait prévalu de la désobéissance civile pour faire une manifestation toute seule avec des slogans expliquant que Vandana Shiva exploitait les ghanéens avec ses mensonges.

Maintenant, on entre de plein pied dans la gestion des objections, la victimisation et le complotisme. D’abord, la parole est Debbie Barker de l’International Forum on Globalization [elle sera plus tard présentée comme rattachée à « Regeneration international »] :

There have been a lot of bad press about Vandana. Anyone who’s going to stand up to big corporations and especially some of the most powerful corporations in the world like the agro-chemical companies, is gonna come under attach some way, somehow. This is a billion dollar industry that’s spending so much moneu to try and denigrate the people who are telling a different story.

Puis, c’est à l’éditrice :

Whenever you take on a mafia of any kind, you are open to a lot of threat and a lot of slander.

On a ensuite une intervention d’un premier détracteur, Mark Lynas:

I can’t see why you describe Vandana Shiva as either prominent or respected. I mean she doesn’t only make statements which are clearly inaccurate and incorrect about farmer suicides and other assertions about Monsanto and BT cotton which are just flat … I mean not just wrong … I would say those are lies.

C’est ensuite au tour de Jon Entine :

Vandana Shiva who is an Indian activist. She claims she’s a scientist. She’s a philosopher who demonizes modern agriculture, calls the Green Revolution an utter failure but has single-handedly blocked the introduction of a lot of technology in Asia and elsewhere.

Grâce à l’effet d’apposition, le réalisateur peut insinuer clairement que Jon Entine et Mark Lynas appartiendraient à une « mafia » de « l’industrie agro-chimique ».

Seeds of doubt de Michal Specter

On retrouve ensuite André Leu : « Their approach always is sow the seeds of doubt. » (1h10’05), puis on a le titre du fameux article de Michael Specter sur Vandana Shiva, qui est justement Seeds of doubt. Le fils de la militante, Kartikey Shiva, commente : « He obviously has a motive and he has .. it’s pre-decided what he’s gonna write. » (1h10’26) Et on a une conférence Ted datée de 2010 où où Michael Specter, je suppose, critique le mouvement anti OGM, disant notamment « The idea we should not allow science to do its job because we’re afraid is a really deadeding and it’s preventing millions of people from prospering. » Puis une citation de son papier : « Vandana Shiva’s positions often seem more like those of an end-of-days mystic than like those of a scientist. »

Cette critique est d’une mauvaise foi terrifiante, car dans l’article même est précisé qu’il avait prévenu la militante de ce qu’il avait dit auparavant. Et lorsque le fils l’accuse d’avoir « un motif », on sort du cadre de l’insinuation et on entre dans la diffamation explicite.

Puis la militante, avec en fond l’image de Michael Specter, on suppose, dit : « Everyone who is part of this Monsanto mafia, you could call it, they thought that they do these attacks and everyone will say : ‘pack up Vandana Shiva.’ But Vandana Shiva is not packable. They don’t realize that, when you do a systems approach in science, when you work on interconnectedness in science … that interdisciplinarity is what has allowed me to combine knowledge from different streams. And if I made a contribution in the world, it’s because of that combined. » (1h11’10 – 1h11’50)

Ainsi, elle n’a répond à aucune critique à part en les accusant de faire partie de la « Monsanto mafia ».

Appel à l’action pour l’agriculture régénérative (1h12′ – 1h16′)

Ce « documentaire » se finit avec un salespitch pour l’agriculture régénérative.

Attention

Comme tout bon salespitch, il commence par problématiser. D’abord avec une intervention à une conférence, conclue par des applaudissements chaleureux :

40% of all our greenhouse gas problems come from a non-sustainable model of agriculture. An yet we keep selling chemical fertilizers everywhere, even when we know they kill the soils and they kill our water bodies. The planet’s health and ou health is non-separable.

Cela nous donne une première « princesse en détresse ». Mais il faut un méchant un peu plus tangible.

Intérêt

Elle continue donc ensuite : « A handful of multinational corporations, literally a cartel of three that I have named the Poison Cartel, is driving species extinction. The poisons they have deployed is pushing the disappearance of bees, the disapperance of pollinators, the disapperance of insects, the disapperance of biodiversity. And industrial agriculture is not just destroying biodiversity, it is destroying soil and releasing large amounts of greenhouse gases to the atmosphere. »

Debbie Barker, maintenant présentée comme rattachée à « Regeneration international » recentre le cadre vers la militante:

Vandana was one of the pioneers bringing up the issue of how critical soil is to climate change. The way we’ve farming these industrial methods have meant that carbon is released from our soils and has gone into the atmosphere to become carbon dioxide.

L’activiste reprend la parole : « This is not a foor system, it’s not an ecological system. It is a recipe for destruction of the planet’s health and the destruction of our health. »

Maintenant qu’on a bien insisté sur le problème, vient la solution.

Désir

Debbie Barker : « Today, one of the big movement is around regenerative agriculture. The need to restore carbon into the soil. » V. Shiva : « I wrote a book called « Soil not Oil ». Now all the data is coming out. Through organic farming we can increase the capacity of the soil to absorb carbon. // Industrial farms are producting commodities. They claim to be feeding the world, but it is the small farms, the biodiverse farms, the ecological farms that produces 75% of the food we eat. Food can be grown in abundant, ecologically sustainable and just ways. »

Action

Enfin, vous le savez, tout bon salesptich se termine par un appel à l’action. C’est le rôle de la dernière partie de la dernière partie.

« But to do this, we need a shift in our perception. We need a change in paradigm. We are part of nature. We must participate in her processes. We have to undestand our interconnectedness, our one-ness on this earth. But this is not how big food and big agriculture works. So, if I travel today it’s because through globalization the powers of corporations have become global. And the same forces that put an Indian farmer to suicide, are threatening the Latin American farmer. Threatening the African farmer. Threatening the Indonesian farmer. Threatening the American citizen by denying them the right to know what they’re eating through labeling tags. Why did Gandhi be the change you want to see. he said, to many people use too much of an excuse to say, I can’t do this because the system much change before I change. But you are a living force in the world. The minute you see are not alone, that you are interconnected with all other living beings, it changes your potential. And we can all find a place to be the change in the ecological food web. You could be a cook. You could be a farmer. You could be an artiste. You could be a scientist. You can be an activist. We are all agents of change. And this way, activism is now an ocean. » Elle conclut par une intervention lors d’une manifestation à la conférence de Copenhague : « You marching tells the leaders ‘we have the power, we will change and we will be the change we want to see.’ And no one is going to stop us. » (1h14’08 – 1h16’18)

Retour au calme dans la campagne indienne, bouclant sur le début du film : « For me, a speech in Copenhagen and saving a seen on this farm that can resist climate change is of the same kind of impact. In an ecological world, everything’s in evolution. Quantum world is everything’s potential, and that means every moment you have a role in terms of which potential you evolve towards. You can do it mindelssly, thoughtlessly, with the ego. Or you can at every step cultivate a constant sens of ‘what’s next ?’. « 

Si vous vous intéressez à la vente, vous aurez sans doute reconnu le framework AIDA : Attention, Intérêt, Désir et Action. Seul point original, l’attention est constamment re-générée, en répétant l’idée d’une menace. Bref : c’est un argumentaire de vente.

Financement

Le film a remercié plusieurs financement:

  • Reva and David Logan Foundation
  • Patagonia
  • Organic Valley
  • Documentary Australia Foundation
  • WWW Foundation
  • Triskeles Foundation
  • The Taylor Ohringer Charitable Fund