Instaurer un double standard consiste à modeler la perception de sorte à ce que, dans un certain contexte, un acteur soit diabolisé et un autre idéalisé. Par exemple, dans la perception publique, les associations et ONG sont présumées vouloir le bien commun et les personnes n’étant pas dans leur sphère d’influence comme étant individualistes et sans intégrité. C’est l’un des outils de manipulation de l’information récurrents de la pseudo-écologie.

Exemples de création de double standard

Anticor

Anticor est une association prétendant agir contre la corruption et les conflits d’intérêts. Or, il est apparu en 2023 qu’elle avait reçu près de 90 000€ d’un entrepreneur proche d’Arnaud Montebourg et caché l’identité de ce dernier même à ses administrateurs. En outre, la présidente d’Anticor, Élise Van Beneden, est également cofondatrice en 2021, avec Denis Robert, du média d’opinion anticapitaliste Blast. C’est elle qui aurait présenté ledit entrepreneur, Hervé Vinciguerra, à ce dernier. Celui-ci aurait d’ailleurs tenté d’utiliser son argent pour orienter la ligne éditoriale de Blast. Pourquoi se serait-il privé avec Anticor, si assidue pour attaquer le gouvernement (sans succès jusqu’ici il me semble d’ailleurs). Enfin, l’association semble accepter les dons « fléchés », c’est-à-dire tendant à financer une action spécifique. Tout cela a récemment été remis sur le devant de l’actualité avec le refus implicite de son agrément.

Ainsi, on a une association supposée irréprochable, prônant la transparence, qui revendique son opacité et ne dit pas non à de l’argent venant d’un obscur système d’entreprises de pays offshores. Les médias enfoncent tellement l’idée que les militants sont désintéressés et que les membres du gouvernement ou acteurs économiques sont pourris, que ça passe.

Stéphane Foucart (Le Monde)

Nous avons observé lors de notre étude sur les articles de Stéphane Foucart sur les néonicotinoïde, plusieurs procédés rhétoriques lui permettant de porter sa désinformation, parmi lesquels le double standard.

Il présentait en effet de manière radicalement différentes les pressions selon qu’elles viennent ou non de l’écosystème antipesticides. La moindre lettre de Monsanto à la direction du CIRC devient une « déclaration de guerre », le moindre recours juridique devient une menace. A l’inverse, les pressions massives des pseudo-écologistes sont toujours présentées positivement, comme un élan populaire. Par exemple: « Le vote s’est déroulé dans un contexte de vive tension, entre lobbying intense des firmes agrochimiques et forte mobilisation du secteur apicole. » L’action des entreprises est un « lobbying intense », alors que l’action du secteur apicole est une « forte mobilisation ».

On l’a aussi vu lorsqu’il parle de conflits d’intérêts: il est extrêment exigeant pour ses ennemis et nie tout pour ses alliés. Par exemple, il présente comme un conflit d’intérêt de nature à biaiser la décision le simple fait d’être employé par un laboratoire travaillant avec des entreprises agrochimiques, mais ne se formalise pas du conflit d’intérêt de Gilles-Eric Séralini (dont l’étude a littéralement été une opération de communication).

On l’a également vu dans ses articles sur les Monsanto Papers, lorsqu’il défendait becs et ongles Christopher Portier contre les accusations de conflits d’intérêts (très légitimes), tout en trouvant des prétextes ahurissants pour accuser de conflits d’intérêts les acteurs d’un comité réuni par l’OMS et la FAO, le Meeting on Pesticide Residues (JMPR).

Le principe du double standard

Le principe du double standard est d’instaurer une perception différente et c’est un élément central dans l’élaboration des narratifs pseudo-écologistes.

Le double standard consiste à traiter différemment deux situations similaires. C’est un sujet très intéressant en sociologie des inégalités de genre. Par exemple, dans la perception des pleurs d’un enfant: si c’est une fille, on pense qu’elle est triste et, si c’est un garçon, on pense qu’il est en colère. De même, une femme peut être perçue comme trop autoritaire pour un comportement qui, chez un homme, serait considéré comme de la fermeté.

Ici, ce double standard est produit intentionnellement par des militants et des entrepreneurs. En matière de pseudo-écologie, on en a surtout deux thèmes:

  • les pressions et violences
  • l’intégrité et conflits d’intérêts

Cette technique permet de pratiquer ensuite les autres manipulations narratives: le couple victimisation/diabolisation et l’inversion victimaire. C’est ce qu’on a vu dans le traitement médiatique de Monsanto Papers: les scientifiques de la sphère privée sont présentés comme n’ayant aucune intégrité, contrairement à ceux du public, ce qui a permis de construire tout l’argumentaire antiglyphosate.

Ce procédé est aussi largement utilisé au-delà de la pseudo-écologie. C’est une des structures de ce que j’appelle la méthode russe.