Les militants pseudo-écologistes attaquent avec virulence les « bassines » ou « méga-bassines ». Mais de quoi s’agit-il ? Comment sont elles combattues ? Sous quels prétextes ? Je vais vous présenter ici le sujet:

  • Les « bassines » ou « méga-bassines »: des retenues d’eau artificielles
  • La désinformation sur les « bassines »
  • Le lobbying anti-bassines

Le contexte : gestion de l’eau et retenues d’eau artificielles

La sécheresse dans le monde

We estimate that the size of the global groundwater footprint is currently about 3.5 times the actual area of aquifers and that about 1.7 billion people live in areas where groundwater resources and/or groundwater-dependent ecosystems are under threat. That said, 80 per cent of aquifers have a groundwater footprint that is less than their area, meaning that the net global value is driven by a few heavily overexploited aquifers.

https://www.nature.com/articles/nature11295

L’actualisation du rapport de Wuilleumier et Seguin (2008) et l’analyse des différents dispositifs de recharge en activité en France indiquent que la quasi-totalité de ces dispositifs emploient des eaux de surface (44 sites sur les 46 recensés comme le montre les annexes 2 à 13) en raison de l’abondance de cette ressource en France.

http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-61821-FR.pdf, p.47

Rétrospective historique de l’irrigation en France

L’irrigation s’est surtout développée par une multiplication des pompages individuels en rivière et en nappe à partir des années 1980. Ces prélèvements ont engendré des perturbations majeures du milieu naturel et aquatique, surtout en période d’étiage. Dans les années 70 et 80, de nombreuses retenues artificielles ont été créées, notamment dans le Sud-Ouest et le Sud- Est, permettant de développer des productions diversifiées mais aussi la culture du maïs.

Les retenues situées sur les cours d’eau ne sont plus soutenues financièrement parce qu’il est désormais démontré qu’elles ont un impact fort sur les milieux du fait de la création d’un barrage en travers du cours d’eau qui entraine une rupture de continuité écologique, la disparition d’habitats naturels, la dégradation de la qualité physico-chimique de l’eau, une modification du régime hydrologique…

http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-61821-FR.pdf, p.18

Le fonctionnement des nappes: souvent pleines en hiver, vides en été

La dimension très locale de la question des nappes ressort clairement quand on regard ces cartes de l’état des nappes.Vous voyez que leur état varie grandement selon l’emplacement. Vous avez même des différences radicales à quelques km de distance, comme au nord de Lyon, où des nappes avec un niveau « autour de la moyenne » côtoient des nappes avec un « niveau très bas« .

En plus de cela, chaque nappe va se comporter différemment selon une myriade de facteurs.

Voici un passage d’un rapport du BRGM qui illustre parfaitement cette complexité:

l’aquifère : type, extension, épaisseur de la tranche saturée, coefficient d’emmagasinement, conditions aux limites hydrogéologiques délimitant la masse d’eau considérée. En effet, les conditions aux limites influent directement sur la circulation de l’eau par le biais du gradient hydraulique. Le type d’aquifère, libre ou captif, conditionne le volume mobilisable par l’intermédiaire du coefficient d’emmagasinement ou de remplissage ainsi que le type d’ouvrage d’alimentation.

http://infoterre.brgm.fr/rapports/RP-61821-FR.pdf

Vous avez tout compris ? Moi non plus. C’est pour cela que, sur ces sujets, il y a des agences réglementaires.

BRGM: https://twitter.com/BRGM_fr/status/1668957131096088582

Retenues d’eau et « bassines »

Il y a de nombreuses sortes de retenues d’eau:

  • Retenues collinaires
  • Barrages

Notez qu’il y a également une logique inverse: le stockage d’eau en profondeur, dans les aquifères ! Cela consiste, en substance, à favoriser le remplissage des nappes (par infiltration ou, plus souvent, par pompage des cours d’eau) en période humide pour la stocker dans l’aquifère, qui pourra la restituer en période sèche. C’est ce qu’on appelle la recharge artificielle des nappes.

La désinformation sur les « bassines »

Je vais maintenant vous présenter la désinformation sur les « bassines ». J’irai assez vite et vous renvoie vers une page dédiée où j’approfondis le sujet.

Les principales accusations désinformatives contre les bassines sont :

  • Vider les nappes. La principale attaque contre les bassines serait qu’elles videraient les nappes et assècheraient les cours d’eau qu’elles alimentent. Cet argument repose sur l’idée reçue selon laquelle les nappes phréatiques seraient un stock immuable ou quasiment. En réalité, ce n’est pas toujours le cas et les études préalables ont justement pour objet d’éviter que ce soit problématique. En fait, les retenues peuvent même améliorer les nappes et cours d’eau d’une région. C’est d’ailleurs ce qui avait été projeté pour des réserves dans les Deux-Sèvres.
  • Diminuer la qualité de l’eau. Exposée, l’eau peut être touchée par l’eutrophisation et le développement de cyanobactéries. Présenté comme un drame absolu, ce risque est pourtant pris en compte est géré.
  • Évaporation. L’eau exposée à l’air peut s’évaporer. Les militants prétendent que ce taux pourrait aller jusqu’à 60% par an. En réalité, il semble plutôt de l’ordre de quelques % par an.
  • Favoriser des cultures demandant beaucoup d’engrais et de phytosanitaires. Je n’ai vu aucune source l’étayant. En outre, les bassines servent surtout à gérer le manque d’eau, pas à arroser sans limites. Cela permet, au contraire, de valoriser correctement les engrais/phytos utilisés en ne perdant pas la récolte sur laquelle on les a appliqués. Il s’agit plutôt d’un bullshit agribashiste.
  • Favoriser les gros exploitants et les inégalités. Il y a de nombreuses exploitations qui profitent des bassines, de toutes tailles, qui ont différentes façons de faire. Tout le monde a besoin d’eau en cas de sécheresse. En outre, il n’y a pas de gagnant si personne n’a d’eau, l’argument des inégalités est donc absurde. Il s’agit plutôt d’un bullshit agribashiste.
  • Ce serait l’appropriation privée de l’eau. Cet argument délirant correspond à un élément de la mythologie pseudo-écologiste et est simplement irrationnel: personne n’est gagnant à laisser partir l’eau dans les océans. Même pas la nature, qui préfère un flux régulier qu’un torrent suivi d’une sécheresse.
  • Ne pas prendre en compte le changement climatique. On voit explicitement décrite la prise en compte du changement climatique dans des rapports du BRGM depuis au moins 10 ans. De plus, le changement climatique devrait rendre encore plus utiles les « bassines ».
  • Ne pas être adapté au changement climatique. Les retenues vont être d’autant plus utiles que les évènement climatiques (pluie, orages) vont devenir plus intenses, les hivers plus pluvieux et les étés plus secs. Pouvoir lisser la « production » d’eau douce par les écosystèmes va devenir de plus en plus important. Les retenues d’eau sont d’ailleurs présentées par le GIEC comme un des éléments pour s’adapter aux changements climatiques..
  • Le GIEC serait assez négatif. Il cite un passage selon lequel « bassines coûtent cher, ont des impacts environnementaux négatifs et ne seront pas suffisants partout au-delà de certains niveaux de réchauffement climatique », comme si cela traduisait une opposition de principe. En réalité, c’est ordinaire dans le style du GIEC: il évoquent les inconvénients à prendre en compte. Inconvénients qui sont justement pris en compte par les autorités pour autoriser les projets. En réalité, le GIEC présente clairement le stockage de l’eau comme une des réponses au manque d’eau.

Encore une fois, j’ai développé ces points dans une page dédiée.

Le lobbying anti-bassines

La désinformation anti-bassines se double d’un intense lobbying, non seulement sous l’angle réglementaire, mais aussi avec des violences extraordinaires.

L’influence réglementaire

Les pseudo-écologistes, bien intégrés dans le système de décision autour des bassines, tentent de le saboter pour empêcher ces dernières. C’est par exemple ce qui ressort dans l’interview de Julien Le Guet :

« il y a 6 ans il y a marqué une nouvelle étape dans cette lutte contre les bassines puisque en Deux-Sèvres il y avait déjà un projet qui était sur la table depuis plusieurs années et qui était bloqué politiquement à l’époque par le Conseil Régional tenu ici par Ségolène Royal et avec surtout dans la commission agriculture des camarades qui sont encore aujourd’hui dans la lutte tel que Benoît Biteau ou Serge Morin et qui avait tout de suite réussi à imposer que s’il y avait financement régional c’était forcément pour aller vers une réelle sobriété, pas la sobriété à la Macron. Et donc comme tous les projets allaient dans le sens d’une augmentation, la région a réussi à ne jamais financer ces projets-là. »

https://pseudo-ecologie.fr/militant-anti-bassine-julien-le-guet-exemple-du-consumerisme-ideologique/

Au regard de l’ampleur des efforts de désinformation mis en œuvre, on doute que les instances où se trouvent des représentants anti-bassines soient exonérées de leur véhémence. Cette désinformation ouverte se double donc probablement d’une désinformation dans ces institutions.

Les violences antibassines

La bataille de Sainte-Soline

Ce qu’on peut appeler la bataille de Sainte-Soline a été le paroxysme de ces violences.

Les articles portant sur les « bassines »


  • Sur le fait que les conclusions du BRGM soient encore valables : https://twitter.com/TerreTerre13/status/1588262520753725442
  • Sur la nature des sols et son influence sur le comportement des nappes : https://twitter.com/TerreTerre13/status/1589608288555270144
  • Sur l’impact du changement clim., entre autres : https://twitter.com/TerreTerre13/status/1642554448923746306
  • « Recharge artificielle des eaux souterraines : Etat de l’art et perspectives », BRGM/RP-61821-FR, septembre 2013
  • « Simulation du projet 2021 de réserves de substitution de la Coopérative de l’eau des Deux-Sèvres« , BRGM/RC-71650-FR Version 2 du 17 juin 2022, http://infoterre.brgm.fr/rapports/RC-71650-FR.pdf